Résumé
Comme tous les sites d’enfouissement, l’installation de gestion des ressources du chemin Brady de Winnipeg produit des gaz d’enfouissement riches en méthane qui font augmenter les émissions de gaz à effet de serre et l’empreinte carbone de la ville. Un système de collecte et de brûlage y a été installé à partir de 2012 pour réduire les émissions, mais la Ville voulait explorer la possibilité de tirer profit des gaz d’enfouissement en les utilisant pour générer des revenus. L’étude visait à évaluer quatre scénarios de captage, de traitement et de vente des gaz d’enfouissement, et a permis de conclure que la meilleure option était de convertir les gaz d’enfouissement en gaz naturel renouvelable pour le vendre sur le marché libre.
Contexte
L’installation de gestion des ressources du chemin Brady, originalement appelée décharge du chemin Brady, a ouvert ses portes en 1973 pour recevoir les déchets solides de Winnipeg et de la région environnante. Située au sud de la ville, elle accepte les déchets résidentiels et commerciaux, dont la quantité totale s’est élevée à 315 500 tonnes en 2021. En 2011, le processus d’élimination des déchets de Winnipeg produisait près de 800 000 tonnes d’émissions d’équivalent en dioxyde de carbone (t éq. CO2), soit près de 15 % du total de la ville.
Depuis 2013, la vocation principale de l’installation est passée de l’élimination des ordures à une approche circulaire de la gestion des déchets. Par exemple, les feuilles et les résidus de jardinage issus de la collecte en bordure de trottoir sont désormais transformés en compost riche en nutriments sur une aire de compostage de neuf hectares, et un programme de recyclage du bois permet de réacheminer les frênes et les déchets de bois d’œuvre aboutissant à la décharge pour une réutilisation dans la confection de meubles et de revêtements de sol.
En 2012, un système a été installé pour collecter et brûler les gaz d’enfouissement. Les décharges produisent ces gaz principalement composés de méthane, un puissant gaz à effet de serre (GES), lors de la décomposition des déchets organiques. La collecte et le brûlage des gaz d’enfouissement permettent de réduire les émissions globales de GES et présentent d’autres avantages, comme la réduction des odeurs. Le système de puits d’extraction de gaz de la décharge a été élargi en 2017 et 2020 et comprend actuellement 80 puits couvrant environ 55 hectares de terrain d’enfouissement (65 % de la surface totale d’enfouissement des déchets). La Ville prévoit élargir encore la superficie de ce système de collecte de gaz d'enfouissement au fil du temps, ce qui entraînera une augmentation de la quantité de gaz collectée.
Le défi
Si la collecte et le brûlage des gaz d’enfouissement permettent de réduire les émissions de GES, ils ne les éliminent pas complètement. Une possibilité de réduire encore plus les émissions est d’utiliser le gaz d'enfouissement collecté comme source d’énergie. Ce combustible peut compenser les insuffisances d’énergie provenant d’autres sources tout en constituant une source de revenus pour l’installation de gestion des déchets et la collectivité. Le défi auquel la Ville a été confrontée était de déterminer la meilleure façon d’utiliser ces gaz, tant d’un point de vue financier que sur le plan des avantages environnementaux et sociaux.
Approche adoptée
La Ville de Winnipeg a commandé une étude pour examiner quatre scénarios potentiels :
- Produire de l’électricité dans une installation sur place, puis la vendre à Manitoba Hydro.
- Transformer les gaz d'enfouissement en gaz naturel renouvelable (GNR) de qualité gazoduc, puis vendre ce gaz sur le marché libre.
- Transformer les gaz d'enfouissement en un combustible de qualité inférieure et le fournir à l’Université du Manitoba.
- Vendre les gaz d'enfouissement à un producteur d’énergie indépendant.
Chacun de ces scénarios a été évalué en fonction des coûts et des avantages potentiels sur une période de 20 ans, ainsi que d’autres facteurs environnementaux, sociaux et économiques, comme la réduction de l’empreinte carbone de Winnipeg.
L’une des questions examinées, entre autres, était la quantité prévue de gaz d'enfouissement produits par l’installation. L’équipe a évalué divers facteurs tels que les taux de valorisation des matières organiques et l’efficacité du captage afin d’établir une prévision réaliste sur laquelle fonder les estimations de revenus. La maturité de chaque technologie envisagée a également été prise en compte, tout comme la présence de cas types existants ailleurs en Amérique du Nord. Cette analyse a également permis d’évaluer des scénarios pour les risques contractuels et les exigences réglementaires.
Obstacles
Une des difficultés rencontrées dans la réalisation de cette étude a été d’obtenir des chiffres précis sur les revenus liés aux marchés potentiels. Les représentants de ces marchés étaient souvent réticents à fournir ces chiffres. Par conséquent, des chiffres prudents ont été utilisés, et on a tenu compte d’imprévus lorsque nécessaire.
Résultats
À l’issue de l’analyse, deux scénarios — la vente de GNR sur le marché libre et la vente de gaz d'enfouissement bruts à un producteur d’énergie indépendant — ont été jugés susceptibles de générer des revenus pour la Ville, dont la valeur actuelle nette est évaluée à 21,36 millions de dollars et à 4,26 millions de dollars respectivement. Étant donné que les revenus estimés de l’option privilégiant la production de GNR sont nettement plus élevés, les auteurs de l’étude ont recommandé à la Ville de procéder à une analyse de rentabilité et à une estimation supplémentaire pour la construction et l’exploitation d’une installation pour produire et vendre du gaz de qualité gazoduc.
Avantages
L’achèvement de cette étude a ouvert la voie à l’utilisation par Winnipeg des gaz d’enfouissement actuellement recueillis et brûlés à l’installation de gestion des ressources du chemin Brady. Pour Winnipeg, non seulement cela aura l’avantage de générer des revenus, mais cela permettra également d’atteindre les objectifs en matière d’émissions de GES énoncés dans son plan d’action sur le changement climatique, le GNR ainsi produit pouvant compenser les émissions produites par le gaz naturel et d’autres combustibles fossiles.
Leçons tirées
L’une des principales leçons tirées de ce projet est l’importance de tenir toutes les parties prenantes informées et mobilisées tout au long de l’étude. Même si une consultation publique n’est pas obligatoire, l’inclure dans le processus peut aider à réduire les retards du projet en cours de route, notamment parce que les citoyens souhaitent discuter de leurs préoccupations avec la Ville.
Prochaines étapes
En mars 2022, le conseil municipal a accepté d’aller de l’avant dans les négociations pour devenir un fournisseur de gaz d'enfouissement bruts à une tierce partie, qui convertira ces gaz en GNR et le vendra ensuite sur le marché. Cette option a été choisie, car elle présente un risque et une responsabilité moindres ainsi qu’une base de clients potentiels plus diversifiée. De plus, les revenus associés doivent être versés dans un nouveau fonds de réserve pour les initiatives liées aux changements climatiques.